• Chemin de Compostelle - Le 19 Mai 1999

    A la pointe du jour, l’orage s’est éloigné, la pluie a cessé. Comme un diable, j’ai bondi hors de la tente. Au bout du ressort, ma tête a dodeliné devant ce spectacle incroyable : autour de la tente une mare d’un pied de profondeur, sans le voir je l’ai montée hier sur un léger promontoire, elle est au sec, les fuites venaient du toit, par le contact des deux toiles détendues, par le vent.

     

    Pour une somme symbolique, Marie, la propriétaire, met à ma disposition un bungalow. Puis nous étendons les toiles sous un hangar. Elle parle peu, juste l’indispensable. Je sens le doux, le caressant, qui se partage dans ce silence. C’est si profond...

    Les vacanciers que je croise, durant le déménagement, me proposent aide et réconfort. J’accepte l’invitation de mon plus proche voisin.

    Nous sommes dans sa caravane, il en fait trop, à la fois désinvolte, sûr de lui et pourtant empressé, maladroit. Il parle beaucoup, je me tais. Il réside dans le camping en célibataire, sa voiture est en panne, il est cinéaste. Il veut me montrer un de ces films, mais il ne parvient pas à faire le branchement, persiste, et dans ce lieu exigu c’est très compliqué, cela dure, jusqu’au moment où, il renonce.

    Il sort deux tranches de viande, elles sentent très mauvais, mais comme il n’y a rien d’autre, il les fait griller, longtemps. Après tout, la viande faisandée, ça se mange !

    « Elle est bonne cette viande ». Il est content, de ma remarque, il avait peur que… Et puis, le voilà qui s’étrangle. Il tousse, crache, il ne parvient pas à s’en remettre et pour finir, il va voir Marie pour qu’elle l’accompagne à la pharmacie.
    Je m’en retourne à ce qui me fait vivre en ce moment. Demain, je reprends la route, quelque soit le temps.

     

    Dans cet abri providentiel, alors que la pluie martèle à nouveau, le corps se détend encore, puis la joie paisible qui ouvre toutes les portes de dedans. Elle s’endort.

    Au plus profond de l’obscurité, la lumière jaillit, invisible, silencieuse. Le jour commence, ce n’est encore qu’une intention, puis le voilà qui se déploie, et qu’arrive le moment le plus froid, le plus humide.

    Le corps se blottit sous la couverture, cherchant à faire durer, encore un peu, la chaleur de cet abandon des choses de ce monde.

     

    « Chemin de Compostelle - Le 18 Mai 1999Chemin de Compostelle - Le 20 Mai 1999 »

    Tags Tags : , ,
  • Commentaires

    Aucun commentaire pour le moment

    Suivre le flux RSS des commentaires


    Ajouter un commentaire

    Nom / Pseudo :

    E-mail (facultatif) :

    Site Web (facultatif) :

    Commentaire :