• Dimanche

    Des éclairs et le canon a tonné toute la nuit. Dans ces contrées on envoie des boulets au ciel pour changer les conditions atmosphériques, faire venir la pluie.

    Tonneraient-ils autant du canon
    S’ils savaient qu’un vol de papillon
    A Paris provoque une tempête à Tokyo ?
    Toute la journée, toute la nuit
    Résonnent les salves dans l’indifférence
    La plus totale.

    Le soleil se lève, il caresse délicatement l’intimité de la terre. Il y a là grande jouissance, l’eau ruisselle de partout, c’est une cascade.
    Mettre la graine dans la bonne terre.
    Je vais à Padron, avant de retourner à Santiago.

    Cette ivresse de découvrir un pays à pieds
    Déjà ce fut des vagues rapprochées de bosses et de creux
    Les sommets chapotés de gros rochers
    Puis un autre col et c’est une vallée
    Elle bruisse de mille bruits, vibre sous la chaleur
    Elle est à la fois si lointaine et si proche
    Je pourrais prendre mille photos
    Qu’aucune ne serait messager
    De ce moment là.


    Au km 20, j’ai été applaudie. Les cyclistes ont une grande admiration pour le piéton voyageur. Comme les vieux et les paysans qui marchent encore, ils s’émerveillent...

    C’est l’heure de marcher un peu. Quand il pleut c’est l’heure de s’arrêter. Que je suis bien ici.

    Maintenant, il va être temps de trouver un coin pour la sieste à l’ombre.
    La nature c’est de la souffrance, du chaud, du froid, du sec, de l’humidité. L’équilibre se fait par l’échange des forces qui alors ne s’opposent plus…
    A travailler contre elles et non avec elles, nous avons tout perdu.

    Que fais-tu là, petit singe ? Lâche cette branche, cesse de t’agripper ainsi, viens je t’emmène au bord de la mer.


    Ici, comme en France, on me donne à boire. Je n’ai manqué de rien, Panadéria, Bar, Restaurant. J’ai lavé mon linge à la rivière, j’aurai bien du mettre de cette eau dans une bouteille pour mes ablutions.
    L’âme du chemin est toujours là. Je venais de demander de l’eau à une petite grand-mère et je pensais qu’il serait bien aussi que je lui demande l’heure, et voilà l’horloge de l’église qui sonne, il est la siété.


    Ah, la danse des parfums dans la descente. Chaque virage dorant sa bosse au soleil exalte les fortes senteurs : eucalyptus, pins, châtaigner et tant d’autres… Dans l’ombre, les saveurs se font moites, tendres, subtiles. Et tu allais oublier le parfum du jasmin et des rosiers et encore les seringuas.

    Voilà, la journée se termine. J’ai bien marché, plus que ce que j’avais prévu. Demain Noïa.

    Ce soir, je suis dans un creux, hier j’étais au sommet

    Qué hora ? J’en sais rien et suis trop loin pour entendre l’horloge.

     


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  • Ce qui s’annonçait hier est là ce matin, le temps est gris.
    Le camping, à quelques kilomètres du cap Finisterre, est au bord de la mer. J'y ai planté ma tente hier, j'ai été à la plage, me suis brûlée les pieds sur le sable chaud. C'est un grand camping, maintenant ils sont nombreux à remballer.

     

    Je suis là, les regardant, les bras ballants, tout est moche dans ce camping et pourtant que la terre est belle ! Je ne peux pas croire que cela soit le résultat de circonstances hasardeuses. Je vois là, une force mystérieuse, une main ouverte, dans un total lâché prise, que là où il y a beauté, la cristallisation de la matière est délicate, transparente et claire comme ce ciel qui s’ouvre sur l’espace. Harmonie !


    Et là, d’une manière tout à fait inattendue, dans ce petit trou de nature, alors que le soleil se manifeste derrière l’épaisseur des nuages, quelque chose de palpable.

    Il revient au moment où je me perds en des partons, en des restons. Déjà, je suis empêtrée dans les conséquences d’hier : le beurre, la confiture, le vin. Tout cela intransportable !

    En es-tu sûr ?


    Le vin dans la gourde

    Le beurre dans la gamelle

    La confiture aussi

    Et me voilà, repartie.


    J’ai retrouvé dès que je me suis dirigée vers le Grand-Est le ciel vacuité.


    Nuit en camping sauvage, entre Corcubion et Noïa.

     


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  • Elles sont nombreuses à gravir la côte vers le phare. Qu’allaient-elles y faire ?

    Me voici redescendu à Finestéria. J’attends que les magasins ouvrent pour quelques emplettes puis je partirai pour le camping.


    Il faut laisser le temps au temps. Ce matin, la brume cache l’horizon, pas d’espace.

     


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  • J’ai vraiment dormi seule dans l’albergue, tous les dortoirs sont vides. Au milieu de la nuit quelqu’un est entré dans celui où l’on m’avait remisée, cette personne cherchait quelque chose dans le noir, elle a fini par partir. Je suis restée un moment aux aguets puis j’ai replongé dans un sommeil profond, jusque tard ce matin. Un café, et me voici partie pour le cap.
    La force des choses m’a conduite dans la petite église romane, authentique.

    Le soleil n’en finit pas de descendre, le temps s’éternise en ce mouvement si lent.
    Entre ciel et mer, une ligne très perceptible, d’une intensité lumineuse blanche.
    J’ai dormi sur ce grand nez qui s’avance dans l’océan sans vague, sans odeur.
    Lune et vénus couchées, le vent a commencé à faire son œuvre, se déchaînant sur mon pauvre couchage, à la pointe du bout du bout.

     


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  • Ai fait mes adieux à Stéphan, dis au revoir à Anthony on doit s’écrire. Et j’ai pris ce bus pour me rapprocher du cap, direction le bout du bout. Je reviendrai le 23 poser ma tête sur ta tête de granit, fils du tonnerre.


    J’ai du descendre du bus, à Corcubin, mal au cœur, plus l’habitude, je me sens si mal enfermée dans cet engin. J'ai donc fini le chemin à pieds pour rejoindre Finestria. Je me présente à l'auberge réservée aux pèlerins, la femme qui est à l'accueil, n'est pas aimable, je ne comprends pas pourquoi, elle me questionne, me parle fort, elle me répète d'un air soupçonneux « à pie ? À pie ? » Je dis que oui, oui, je suis venue à pieds !

    Je comprends un peu plus tard, je me suis installée à une terrasse surplombant la place et l'entrée de l'auberge, je la vois renvoyer les pèlerins descendus du car. Pour finir, je suis seule dans cette grande auberge de Finesteria. La folie humaine est grande !


    Je fais les comptes, ça va être long de rester en Espagne jusqu’au 24, nous verrons bien...

    Je tente de me mettre face à cette force qui m'a poussée à sortir de chez moi, partir sur le chemin. Ce n'est pas confortable, pas encore... me murmure la voix.

    J'ai vu la joie de Stéphan, il s'est nourri d'un sentiment de réussite, et puis le retour à la maison cette idée le réjouissait, retrouver le confort, la sécurité, la famille, le travail, etc.

     

    Je n'ai eu de cesse de répéter : « Ne dis pas j’ai réussi, je suis payé de ma peine » Et là c'est comme un sentiment d'échec...

    Échec et victoire, n’est ce pas la même chose ?
    Les deux faces d’une même médaille
    La force n’est t-elle pas là, au cœur même du désespoir ?
    N’y a-t-il plus aucun espoir?

    As-tu du plaisir, de l’ivresse à faire cela ?
    Si tu dois répondre non, retourne chez toi
    Dans cette existence-là, tu ne seras jamais libre
    Quitte cette berge où il est question
    De subir les « Je ne peux pas, on ne peut pas faire autrement. »

    Peux-tu aller ce chemin, le chemin qui n'est pas ?
    Peux-tu aller sereinement et librement ?
    Peux-tu aller avec courage et la tête haute ?
    Alors va, c’est là ton chemin qui a du cœur.

     


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  • Et déjà tu oubliais que tout vient de l’intérieur : la force, la sagesse, la joie, la paix..  Rire ! La confusion aussi !

    Alors j’ai réglé tout ce qu’il y avait à régler, pour ça j’ai beaucoup marché.
    Sur le livre d'or, un mot de Stéphanie et Jean Lou, ils sont arrivés ici, avec Esthel le 10. Je retrouve Anthony et Stéphen, un jeune allemand souvent croisé sur le chemin.


    Le soleil va passer de l’autre côté, il se couche derrière la cathédrale. Moment partagé avec Anthony. Puis la lune, épanouie dans plénitude.
    « Elle se la pète ». La voix est venue du souvenir, cette adolescente au foyer, agressive, violente si souvent, perverse aussi, mais qui avait toujours raison dans ses remarques, elle avait le pouvoir de voir juste et de le dire. Que vient-elle faire ici ?

    Longtemps nous discutons, Vénus se couche à son tour, la ville s'allume et plonge en ses lumières …

     


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  • Là, sous peu, je vais gravir le Mont Joie, et de là haut, avec tant d’autres et pourtant seule, je vais m’élancer vers toi.


    Tutut !!!! Il n’y avait plus rien à gravir, le sommet était là à porter de mains et de voix.

    Arrêt au monument, laid, en vérité. Et puis, comme toutes les entrées en ville, c’est désastreux.

    Je redescendais la colline que je rencontre mon ami Français, le visage complètement épanoui, et moi, je suis molle, molle, molle. Je retarde le moment avec une cervezas.

    Il y a quelques jours, je ne savais pas que je vivais un moment béni, j’en ai joui et c’est bien ainsi.

    Que dire de cette journée ? Je n’ai pas pris de note, des souvenirs, quelque chose qui ne peut pas aboutir ou bien qui est déjà fini.
    Souvenir d’avoir marcher dans la ville où les traces avaient disparu et où je me suis perdue.

    Souvenir de ne plus pouvoir parler, et tourner en rond, certainement autour de la cathédrale, sans rien ne demander à personne. Pourtant, ils sont nombreux en la ville.

    Puis, être arrivée sur la place, celle de la porte, qui ne s’ouvre que pour les jubilés, là, il y a foule…

    Alors sous un soleil ardent, le sac sur le dos, j’attends mon tour. Des personnes se disputent pour une histoire de place, la police doit intervenir.
    Enfin, entrer dans la cathédrale, et passer devant les reliques dans l’agacement des rites de ceux qui me précédent. Ils ont attendu, alors ils entendent en profiter, et l’hypocrisie, plutôt que la ferveur, et ma fatigue.

    Chercher le lieu qui accueille, complet malgré sa grandeur, dormir au sol, et là, ne pas supporter cet accueil froid, de ne pouvoir s’allonger dans un lit.


    Où est la Joie, où est l’immensité de ce bonheur ?

    Nous avons tant marché pour arriver là
    Tant de pas et de fatigue
    Tant de beautés et d’amitié
    Que cet instant fugace n’est que fragilité.

    Et dans les larmes et dans le désarroi
    La parole s’est fait entendre :
    C’est chaque jour, chaque soir
    A chaque moment que tu dois déposer
    La graine dans un cœur pur de toutes attentes.

    Va pèlerin, poursuis ta quête
    Va sur le chemin…

    Demain? La pointe, aller jusqu’au cap...

     


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