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Je me souviens d’une histoire que l’on m’a racontée, une histoire au long d'un chemin de vie.
Une famille, grande famille, liée par la pauvreté et la religion. Le manque de travail, d’argent, l’inquiétude du 1er au dernier du mois. Dans cette litanie seuls les jours, plus sombres encore, venaient briser le cours du temps qui passe. Il y eut comme ça une période où tout fit défaut plus qu’à l’ordinaire.
Tout a une fin, même le malheur !
Et alors que la peur de se voir expulsés du logis s’éloignait, un des enfants, le plus petit, découvrit l’oiseau mort dans sa cage.
Aucun n’avait pensé à donner à boire à cet être vivant, aucun ne l’avait entendu s’égosiller dans sa prison pas dorée du tout, puis il s’était tu.
Cet enfant compris que dieu ne s’occupe pas de nos petites affaires, ni de nos grandes misères. Il n’en conçut aucune rancœur, il devint prêtre et se consacra à lutter contre la misère tenue pour responsable de cette surdité.
Il me semble pourtant que c’est notre surdité qui permet la misère.
Par tous les temps, garder le cap, ou le perdre à jamais.
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Celui de la maison, au-delà les bruits du voisinage…
Il est des maisons qui accueillent le silence, j’en ai connues, il a fallu les quitter. Ces maisons sont de vieilles pierres, entourées d’un grand jardin où la végétation est dense, de cachettes pour les enfants, de coins frais pour l’été. On s’y promène volontiers, regarder les arbres pousser et les fleurs s’ouvrir au petit matin, s’asseoir près de la margelle, se pencher au-dessus du puits. Le soir, le soleil vient caresser de ses longs cheveux, puis la nuit y murmure son chant profond.
En cette maison, le silence s’est fait absence, il sonne comme du métal qui tombe sur le carrelage. Il parle d’un vide qui ne peut jamais se remplir. Alors, le laisser sortir de la maison, c’est facile, les fenêtres sont toujours ouvertes. Là il se remplit du chant des grillons et du parfum du jasmin, parfois des nuits torrides des crapauds, mais il ne devient pas encore familier.
Il est des endroits particuliers, des endroits qui bruissent, j’en ai connus, il a fallu les quitter. Ils parlaient de ventres chauds, de sous-bois parfumés et habités, de rivières vivantes, de la plaine qui tremble sous le soleil de Juillet, et aussi au cœur de l’hiver, des embruns de l’océan. Ils parlaient de gothique, de roman, de ruelles aux pavés décousus, de vieux bistrots, de caves voûtées.
C’est le ciel, vacuité, qui enfin l’accueille ce silence, il s’ouvre sur l’infini, plus loin, plus définitif, sans désir de retour sur la douceur du souvenir.
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Des mots qui m’ont accompagnée
Je ne sais qui les a prononcés la première fois
Au rythme de la marche lente
De celui qui sait que chaque pas
Est le premier et le dernier
Le cœur en paix"Va pèlerin, poursuis ta quête
Va sur le chemin, que rien ne t’arrête
Le cœur en éveil, oublie l’éphémère
N’attache pas ton cœur à ce qui se passe
Ne dis pas j’ai réussi, je suis payé de ma peine
Ne te repose pas en tes œuvres
Elles vont te juger
Garde la parole en ton cœur
C’est là ton trésor"
"Le chemin sera notre chanson
Nos pas, nos mots
La fatigue, notre prière"
Auteur inconnu
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Marcher ...
Elle avait quitté les vastes plaines
Où l’homme avait construit les cités
Depuis des jours, elle gravissait la montagne
Routes, chemins, en lassés
Des jours, des mois, des années, des vies
A suivre ce tracé, larges virages
A droite, à gauche,
Dans la fatigue du nez collé aux pas
Dans la découverte de si beaux paysages
Tous les temps se succédant, froid, chaleur
La soif, et puis mouillée jusqu’aux os
Et puis surgissant de nulle part
L’arrêt commandé par le corps
Et autre chose, invisible présence.
Points de vue embrassant toute la vallée
Grottes profondes et fraîches
Ruines tapies, sous-bois herbeux
Retrouver dans l’instant
Le goût de l’éternité
Et chaque soir, ce repos accordé
Moments de joies paisibles offerts.
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Lorsque les choses importantes approchent
Cela se sait, l’esprit se tait
Le corps en attention
Non pas tendu
Si vivant.
Elle avait atteint un plateau
Où la marche était aisée
Quand cela surgit au loin
Un sommet culminait
Les yeux devinaient une sente
Sur le dos de la bête
Toute droite, comme une échelle
De la terre au ciel.
Elle stoppa net
Elle savait que le chemin passait là.
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Le petit chat d’un jour
Un jour, sur le chemin de Compostelle, un passage difficile entre France et Espagne, la fatigue d’un voyage à pieds déjà si long, et puis ne pas parler espagnol, et puis la pluie, et puis… l’envie poignante de rentrer à la maison.
La veille il y avait eu Janine, accueillante au gîte de St Jean Pied de Port, c’est fou quand cet espace s’ouvre entre deux personnes ! Je ne montrais ni ma peine, ni ma souffrance, et mes larmes ne coulaient que dans la solitude du chemin, mais j’ai si bien senti tout son corps, recevoir, caresser, consoler, dans le silence, comme si de rien n’était. Ouahhh, ça c’est très fort ! Elle m’avait aussi donner quelques conseils : avec ce temps ne pas aller seule par la montagne, préférer alors la route pour se rendre à Roncesvalles.
J’avais pris rendez-vous avec un petit groupe de filles, mais le matin à l’aube, j’ai attendu en vain, alors j’ai pris la route…
Me suis arrêtée, la frontière passée, sur un parking. Que cet endroit était sale et inhospitalier ! Flaques boueuses tachées d’hydrocarbures, poutres métalliques, rouilles, tout le désastre de la civilisation me pénétrait. Mais il y avait nécessité, un peu me reposer, poser le sac, manger…
J’étais là, assise du bout des fesses, lorsqu’est arrivé un petit chat… doux jésus, il était si maigre, borgne, dépoilé. Ouahhh la vague ! Incommensurable vague, la misère, la souffrance, la peur, je ne pouvais plus y résister, elle m’a emportée comme elle emportait tout en cet endroit, croisement de lignes invisibles…
Puis, j’ai donné à manger à ce pauvre minou, l’ai caressé, lui ai parlé : « Je ne peux pas t’emmener, il faut que j’y aille ». Alors, sans plus me retourner, j’y suis allé.
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Quelque chose a quitté, là, sans faire de bruit, dans la nuit. Tout est bien, je suis en paix, c’est accompli.
Dans ce petit matin à Padron, sous le toit de cette antique maison, le voyage est fini.
Le soleil est là. J’ai payé pour deux nuits.
Le vent s’est levé, et la petite chapelle se remplit peu à peu. Le cris des mouettes rieuses, me ramènera toujours sur tes pas.
Tous, ils sont arrivés, un beau matin
Ou plus tard en la journée
Ils sont arrivés sur cette place
Le nez en l’air.
Ceux qui allaient vite
Ceux qui ne se pressaient pas
Ils sont là, devant la cathédrale
L’air perdu, graves ou joyeux
Toute cette longue peine qui n’en finissait pas
Toute cette tension vers ce but
Et les voilà, coquilles échouées sur la grève
La mer, les a vomit, ils ne sont plus d’elle
La grappe s’est égrainée et un par un
Ils repartent.
Ceux d’ici dans la moiteur du soir
Les autres, dans la fraîcheur du petit matin.
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