• Elles sont nombreuses à gravir la côte vers le phare. Qu’allaient-elles y faire ?

    Me voici redescendu à Finestéria. J’attends que les magasins ouvrent pour quelques emplettes puis je partirai pour le camping.


    Il faut laisser le temps au temps. Ce matin, la brume cache l’horizon, pas d’espace.

     


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  • J’ai vraiment dormi seule dans l’albergue, tous les dortoirs sont vides. Au milieu de la nuit quelqu’un est entré dans celui où l’on m’avait remisée, cette personne cherchait quelque chose dans le noir, elle a fini par partir. Je suis restée un moment aux aguets puis j’ai replongé dans un sommeil profond, jusque tard ce matin. Un café, et me voici partie pour le cap.
    La force des choses m’a conduite dans la petite église romane, authentique.

    Le soleil n’en finit pas de descendre, le temps s’éternise en ce mouvement si lent.
    Entre ciel et mer, une ligne très perceptible, d’une intensité lumineuse blanche.
    J’ai dormi sur ce grand nez qui s’avance dans l’océan sans vague, sans odeur.
    Lune et vénus couchées, le vent a commencé à faire son œuvre, se déchaînant sur mon pauvre couchage, à la pointe du bout du bout.

     


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  • Ai fait mes adieux à Stéphan, dis au revoir à Anthony on doit s’écrire. Et j’ai pris ce bus pour me rapprocher du cap, direction le bout du bout. Je reviendrai le 23 poser ma tête sur ta tête de granit, fils du tonnerre.


    J’ai du descendre du bus, à Corcubin, mal au cœur, plus l’habitude, je me sens si mal enfermée dans cet engin. J'ai donc fini le chemin à pieds pour rejoindre Finestria. Je me présente à l'auberge réservée aux pèlerins, la femme qui est à l'accueil, n'est pas aimable, je ne comprends pas pourquoi, elle me questionne, me parle fort, elle me répète d'un air soupçonneux « à pie ? À pie ? » Je dis que oui, oui, je suis venue à pieds !

    Je comprends un peu plus tard, je me suis installée à une terrasse surplombant la place et l'entrée de l'auberge, je la vois renvoyer les pèlerins descendus du car. Pour finir, je suis seule dans cette grande auberge de Finesteria. La folie humaine est grande !


    Je fais les comptes, ça va être long de rester en Espagne jusqu’au 24, nous verrons bien...

    Je tente de me mettre face à cette force qui m'a poussée à sortir de chez moi, partir sur le chemin. Ce n'est pas confortable, pas encore... me murmure la voix.

    J'ai vu la joie de Stéphan, il s'est nourri d'un sentiment de réussite, et puis le retour à la maison cette idée le réjouissait, retrouver le confort, la sécurité, la famille, le travail, etc.

     

    Je n'ai eu de cesse de répéter : « Ne dis pas j’ai réussi, je suis payé de ma peine » Et là c'est comme un sentiment d'échec...

    Échec et victoire, n’est ce pas la même chose ?
    Les deux faces d’une même médaille
    La force n’est t-elle pas là, au cœur même du désespoir ?
    N’y a-t-il plus aucun espoir?

    As-tu du plaisir, de l’ivresse à faire cela ?
    Si tu dois répondre non, retourne chez toi
    Dans cette existence-là, tu ne seras jamais libre
    Quitte cette berge où il est question
    De subir les « Je ne peux pas, on ne peut pas faire autrement. »

    Peux-tu aller ce chemin, le chemin qui n'est pas ?
    Peux-tu aller sereinement et librement ?
    Peux-tu aller avec courage et la tête haute ?
    Alors va, c’est là ton chemin qui a du cœur.

     


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  • Et déjà tu oubliais que tout vient de l’intérieur : la force, la sagesse, la joie, la paix..  Rire ! La confusion aussi !

    Alors j’ai réglé tout ce qu’il y avait à régler, pour ça j’ai beaucoup marché.
    Sur le livre d'or, un mot de Stéphanie et Jean Lou, ils sont arrivés ici, avec Esthel le 10. Je retrouve Anthony et Stéphen, un jeune allemand souvent croisé sur le chemin.


    Le soleil va passer de l’autre côté, il se couche derrière la cathédrale. Moment partagé avec Anthony. Puis la lune, épanouie dans plénitude.
    « Elle se la pète ». La voix est venue du souvenir, cette adolescente au foyer, agressive, violente si souvent, perverse aussi, mais qui avait toujours raison dans ses remarques, elle avait le pouvoir de voir juste et de le dire. Que vient-elle faire ici ?

    Longtemps nous discutons, Vénus se couche à son tour, la ville s'allume et plonge en ses lumières …

     


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  • Là, sous peu, je vais gravir le Mont Joie, et de là haut, avec tant d’autres et pourtant seule, je vais m’élancer vers toi.


    Tutut !!!! Il n’y avait plus rien à gravir, le sommet était là à porter de mains et de voix.

    Arrêt au monument, laid, en vérité. Et puis, comme toutes les entrées en ville, c’est désastreux.

    Je redescendais la colline que je rencontre mon ami Français, le visage complètement épanoui, et moi, je suis molle, molle, molle. Je retarde le moment avec une cervezas.

    Il y a quelques jours, je ne savais pas que je vivais un moment béni, j’en ai joui et c’est bien ainsi.

    Que dire de cette journée ? Je n’ai pas pris de note, des souvenirs, quelque chose qui ne peut pas aboutir ou bien qui est déjà fini.
    Souvenir d’avoir marcher dans la ville où les traces avaient disparu et où je me suis perdue.

    Souvenir de ne plus pouvoir parler, et tourner en rond, certainement autour de la cathédrale, sans rien ne demander à personne. Pourtant, ils sont nombreux en la ville.

    Puis, être arrivée sur la place, celle de la porte, qui ne s’ouvre que pour les jubilés, là, il y a foule…

    Alors sous un soleil ardent, le sac sur le dos, j’attends mon tour. Des personnes se disputent pour une histoire de place, la police doit intervenir.
    Enfin, entrer dans la cathédrale, et passer devant les reliques dans l’agacement des rites de ceux qui me précédent. Ils ont attendu, alors ils entendent en profiter, et l’hypocrisie, plutôt que la ferveur, et ma fatigue.

    Chercher le lieu qui accueille, complet malgré sa grandeur, dormir au sol, et là, ne pas supporter cet accueil froid, de ne pouvoir s’allonger dans un lit.


    Où est la Joie, où est l’immensité de ce bonheur ?

    Nous avons tant marché pour arriver là
    Tant de pas et de fatigue
    Tant de beautés et d’amitié
    Que cet instant fugace n’est que fragilité.

    Et dans les larmes et dans le désarroi
    La parole s’est fait entendre :
    C’est chaque jour, chaque soir
    A chaque moment que tu dois déposer
    La graine dans un cœur pur de toutes attentes.

    Va pèlerin, poursuis ta quête
    Va sur le chemin…

    Demain? La pointe, aller jusqu’au cap...

     


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  • Dimanche
    Je me suis réveillée avant la pointe du jour, mais la fièvre semble m’avoir quittée ne laissant que la fatigue. Trop de fatigue, je reprends les rênes de ce cheval fourbu, et n’irai pas au-delà de mes limites aujourd’hui, la nouvelle lune c’est Mardi.


    Plus difficile de faire 20 km qu’hier 40, un vrai supplice malgré les pauses. Un monde fou sur le chemin, un troupeau de moutons au galop.
    A 21 km de Santiago, au bord de la nationale, dans un relent de pisse, je tente de remettre la machinerie en route.

    « Laisse-moi marcher dans la beauté. »


    J’arrive à l’albergue de Santa Irene, plus de place. Je me dis, je me repose un peu puis je repars. J’étais en train de manger dans la cuisine, lorsque j’entends un homme parler avec l’hospiterios : « … Frances, la Frances… » Et voilà que l’on me donne un lit ! Le sien, peut-être, celui de cet homme, je ne sais pas, je ne cherche pas à comprendre, je remercie, je m’effondre dans la chose sans même me doucher.

    Sommeil profond jusqu’à la siesté. Là, le bruit, mais aussi la faim qui me fait remonter la côte jusqu’au restaurant.

    Ah, les sandwichs (Bocadillos) sont secs, pain et… ni beurre, ni tomate, ni mayo, ni cornichons… Enfin, un progrès depuis quelques jours le pain est bon.


    Santiago est à 21 km.

     


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  •  Je suis partie, disons avec le troisième train, dans la nuit et le brouillard. Il pleut sous les grands arbres. Ainsi la terre jouit même là où le soleil s'absente.


    Le soleil caresse le haut des monts
    Là un chapeau mordoré
    Ici une ligne brisée
    Plus loin un faisceau brumeux
    D’où émergent de mystérieuses crevasses.

    Tout cela sous le regard attendri
    De dame lune.

    Le chemin s’enfonce inexorablement
    Dans le ventre de la terre
    Ici, il traverse un village
    Aux ruelles encaissées
    Où l’eau claire court entre les pierres.

    Un pont pour franchir la cascade
    Sans les flèches jaunes comment
    Ne pas se perdre dans ce dédale.

    Les chiens profitent de la fraîcheur
    Cet après midi ils chercheront l’ombre
    Les moutons attendent patiemment
    L’heure de l’alpage
    Et déjà voici le cimetière.

    Là où dorment les anciens
    Passe celui qui est tombé hier
    Déjà nous remontons
    Pour redescendre bientôt
    Ainsi le chant de la rivière
    Va crescendo.

    L’amie fidèle est toujours là, trace fine
    Trait épais, point sur le dos de la pierre
    Tant de regards l’ont cherchée, espérée
    Et finalement avec soulagement trouvée
    Elle est celle qui guide, rassure
    Relie le pèlerin au camino
    Les pèlerins entre eux
    Ceux d’aujourd’hui, ceux d’hier.

    Cette fois-ci ça y est, l'astre du jour a franchi le sommet
    Et le voici qui court dans l’eau
    Passe la vallée et vient caresser la joue
    Dans la montée, il commence à me réchauffer.

    Au versant des coteaux ce sont les ombres
    Maintenant qui se jouent du soleil
    Et le chemin de même va et vient
    Ici c’est une allée ombragée
    Où il fera bon plus tard de musarder.

    En voilà une qui passe à toute allure
    Laissant derrière le mari
    Elle se dépêche, dit-elle, d’arriver
    Avant les grosses chaleurs
    Mais déjà elle transpire dans la fraîcheur
    Plutôt que d’en profiter.

    Quand le soleil a enfin caressé
    Le pubis de la terre
    Des odeurs suaves se sont élevées
    En volutes bleues…

    Il y avait là une belle croix sur un monticule, une vierge à l’enfant
    C’est là que Gandhy est apparu.

     


    Maintenant, c’est l’heure du défilé, le dernier train pour Melide. Les autres attendent depuis 10 heures à la porte de l’albergue de Palas de Rei. Pourvu qu’ils ne se battent pas, la tension est forte, la peur d’être à la rue, ne pas avoir de lit…


    Depuis quelques jours, ça patrouille sur le chemin, en voiture, à cheval, en moto.
    Le vent se lève et ça c’est très agréable.


    La décision est prise, j’ai un peu les boules, je suis bien ici, j’ai un lit, il y a de l’espace et la fatigue ne manque pas. Mais voilà, si je refais 10 km ce soir, demain je pourrais être à Santiago. Se poser pour le moment et tranquillement faire ce qu’il y a à faire.


    Fred m’a dit n’oublie pas Patrick, ni Nuque raide. Demain lorsque je vais poser mon front sur la tête de granit, je veux rayonner d’amour et de compassion pour tous.

    Patrick… tout est si loin, maintenant. Tu es mort et c’est comme si je ne savais plus. Le pardon ? Pour toi d’être parti ? Pour nous deux, d’avoir blessés ces enfants là, les nôtres ? Pour moi ? Trop égoïste, centrée sur ma souffrance et mes doutes ?

    Paix ait ton âme, mon ami, mon doux, mon tendre, je caresse ton visage, je ferme tes yeux, à tout jamais. Ne soyons plus tristes. Ce soir partons ensemble, pour marcher un peu…

    Demain, en décider, sera un grand jour !

     


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